Les inséparables
Ils ne se quittent pas. Là où est l’un est l’autre. Et ça fait longtemps que ça dure. Depuis le soir où elle lui a ouvert la porte de chez elle, sans savoir qui était ce jeune Suisse de Lugano. « C’est un ami commun qui nous a présentés. » C’était dans le VIIIe arrondissement de Paris. « J’ai grandi là. Je suis une vraie parisienne et je n’ai jamais vécu ailleurs que sur la rive droite. » Elle lui a donc ouvert la porte et ça a été le coup de foudre. Immédiat. Ils étaient étudiants avec l’envie de faire un bout de chemin ensemble. Ils ont traversé la Manche. Direction l’Angleterre. Elle, pour intégrer une école de design. Lui, pour cumuler licence de socio et licence de théâtre, avant de bosser comme scénographe à la BBC. Trois ans plus tard, Christine et Nicola Borella sont mariés, de retour à Paris, avec le souhait de travailler aussi ensemble. Ils partagent la même salle de bains, alors pourquoi pas aussi le même bureau ? Quand on leur demande si c’est facile à vivre d’être à deux tout le temps, ils ne comprennent pas la question. Pour eux, c’est une évidence. « C’est comme travailler en famille, rétorque-t-elle. Même si ce n’est pas toujours rose... » Il l’écoute. Il sourit. Elle poursuit : « A bien y réfléchir, je ne sais pas si j’aurais pu travailler avec un frère, une sœur, une belle-mère... mais avec Nicola, si. »
Deux ans sans rideaux...
Installés dans le 1er arrondissement, à deux pas du marché Saint-Honoré, depuis une trentaine d’années, ils font moins de cinq minutes à pied pour rallier leur appartement au bureau. Il a débuté comme scénographe et créateur de décors. Elle, comme décoratrice et architecte d’intérieur. « Peu à peu, l’un a aidé l’autre sur ses dossiers, ses chantiers », dit-elle. A court terme, il y avait une logique à ce qu’ils fassent cause commune. « C’est arrivé au bout de sept ans. » Sept ans de réflexion avant de signer ensemble des réalisations d’appartements, d’hôtels, de restaurants, de bateaux... Il parle de « travail en intelligence », « en équipe », « à l’écoute des autres ». « Les tensions, c’est lorsque nous devons choisir la déco pour chez nous », confie-t-elle : « Nous avons vécu deux ans sans rideaux, car nous n’étions pas d’accord sur nos choix respectifs ! » Même scénario pour recouvrir des bergères : « La sélection des tissus a pris un an et demi. »
Neil Young et Paul Smith
Gamine, elle voulait déjà devenir architecte d’intérieur, « pour améliorer le confort des gens ». Lui aussi était plutôt bien inspiré : il se voyait « constructeur », lorsqu’il jouait avec son camion dans le sable... Autre plongée dans leurs souvenirs : elle cite Harvest, l’album de Neil Young, « toute mon adolescence ». Lui, même s’il joue de la guitare, n’évoque pas d’anecdote musicale. Il raconte son voisinage avec le styliste anglais Paul Smith, alors inconnu en France. « C’était le début des années 1990. Il habitait au 1er étage et garait son vélo au rez-de-chaussée de l’immeuble où nous vivions. En voyant son nom sur la boîte aux lettres, je me demandais : qui est ce monsieur Smith ? » Aujourd’hui, il porte ses chemises.